CRÉER UN NUANCIER DE COULEURS À L’AQUARELLE

Lorsque l’on pratique plusieurs techniques de peinture, l’on constate vite qu’il est beaucoup plus complexe de mélanger et superposer les couleurs à l’aquarelle qu’avec de la peinture à l’acrylique ou à l’huile.

L’aquarelle est une technique lumineuse et délicate, mais elle peut aussi être capricieuse, surtout lorsqu’il s’agit de mélanger les couleurs.

Contrairement à l’acrylique ou à l’huile, les couleurs à l’aquarelle se ternissent ou deviennent rapidement boueuses si elles sont mal associées. Par ailleurs, contrairement aux autres techniques, on éclaircit une couleur en la diluant avec de l’eau, pas en y ajoutant du blanc, ce qui la rendrait opaque et terne.

Enfin, les retouches sont très délicates, parfois impossibles, à l’aquarelle : contrairement aux techniques de peinture à l’huile ou à l’acrylique, on ne recouvre jamais une œuvre ou partie de l’œuvre pour la retravailler. Ajouter de l’eau à une aquarelle pour éclaircir les couleurs peut aussi déchirer le papier et donc détruire l’œuvre irrémédiablement. 

Il est donc important d’apprendre à bien mélanger ses couleurs, mais aussi de garder une trace de ses essais, ne serait-ce que pour créer sa propre gamme de couleurs.

Il existe des palettes proposant un très grand nombre de couleurs à l’aquarelle prêtes à l’utilisation, en godets ou en tubes. Cependant, il est fréquent d’utiliser des couleurs et nuances plus que d’autres (moi, par exemple, j’utilise essentiellement des gammes de bleus et de verts, très peu de couleurs chaudes, que je n’applique que par petites touches). Lorsque l’on achète ce type de palettes toutes prêtes, on vide ainsi très vite certains godets et d’autres ne nous servent pas, ce qui est dommage…

Il vaut donc parfois mieux acheter des palettes ne contenant que des couleurs basiques, puis les mélanger soi-même pour créer ses propres couleurs. C’est à ce moment qu’il devient important de créer un nuancier pour se rappeler quelles couleurs de base ont été mélangées pour obtenir tel résultat.

Si vous préférez utiliser une palette abritant des couleurs prêtes à l’emploi, créer un nuancier est aussi utile, car la couleur compacte du godet ou du tube ne correspond pas à celle que vous obtiendrez sur papier, pour la simple raison que plus vous la diluerez avec de l’eau pure, plus cette couleur sera claire et transparente, ce qui représente une des principales spécificités de l’aquarelle.
 

Pourquoi créer un nuancier ?

Que vous utilisiez une palette de base ou une boîte complète de plus de 50 couleurs prêtes à l’emploi, un nuancier vous permettra de :

• visualiser le rendu réel des couleurs sur papier, car la teinte dans le godet ou le tube est souvent très différente de celle obtenue une fois diluée ;
• mémoriser vos mélanges personnalisés, notamment ceux que vous utilisez souvent ;
• éviter les mauvaises surprises lors de vos prochaines créations, surtout si vous peignez sur le vif, en carnet de voyage par exemple.

MATÉRIEL NÉCESSAIRE

• Papier aquarelle (300 g/m² de préférence pour éviter les ondulations) ;
• Peintures aquarelle (godets ou tubes) ;
• Un pinceau universel à bout arrondi (si possible en poil naturel, de type Marthe rouge, car il retient mieux les pigments de peinture et l’eau) ;
• 2 récipients d’eau : un pour mouiller votre pinceau propre, l’autre pour le rincer ;
• Palette blanche ou assiette blanche (surtout pas colorée, car vous ne pourriez alors avoir une idée du rendu réel de la couleur sur le papier aquarelle blanc) ;
• Crayon à papier HB ou H (non gras) ;
• Règle (facultative mais utile pour un rendu net) ;
• Cotons-tiges ou chiffon pour absorber l’éventuel excédent d’eau ;
• Ruban de masquage

ÉTAPES POUR CRÉER VOTRE NUANCIER

• Tracez des cases sur le papier :
  Dessinez des carrés ou rectangles réguliers sur votre feuille à l’aide du crayon à papier HB ou H mais jamais gras (car au contact de l’eau, cela salirait vos couleurs). Utilisez du ruban de masquage si vous souhaitez un rendu très net autour des cases tracées. Ces zones serviront à tester vos couleurs et à noter, à côté ou dessous, soit la référence de la couleur (s’il s’agit d’une palette avec de nombreuses teintes prêtes à l’emploi), soit votre propre référence (ex : rouge carmin + 3 gouttes d’eau).

• Préparez vos couleurs :
  Choisissez les couleurs que vous souhaitez inclure : couleurs primaires, secondaires, ou vos teintes préférées. Si votre palette contient beaucoup de godets, commencez par celles que vous utilisez le plus ;
• Appliquez la couleur pure :
  Mouillez légèrement votre pinceau, chargez-le en couleur, puis appliquez-la dans une case. N’hésitez pas à créer une version diluée à côté pour montrer la variation selon la quantité d’eau (ex : rouge carmin + 2 gouttes d’eau, + 3 gouttes d’eau, etc…) ;

• Faîtes vos mélanges, selon la méthode qui vous intéresse :
  • ​Sur une palette : Mélangez deux teintes directement dans une zone propre pour créer une nouvelle couleur (ex : bleu + jaune plus ou moins dosés et humides pour obtenir le vert souhaité) puis appliquez-la dans une des cases de test sur votre papier aquarelle ;
  • Superpositions sur le papier : Appliquez une couleur (ex : jaune), laissez-la sécher complètement, puis superposez une autre couleur (ex : bleu) pour observer les effets de transparence ou d’interaction, plus ou moins réussis.
    NOTA BENE : Les couleurs les plus claires doivent être posées en premier. N’hésitez pas à tester 1) couleur claire 2) couleur plus foncée puis 3) couleur foncée 4) couleur claire pour observer les résultats. ATENTION : Vous devez laisser chaque couleur sécher complètement avant de passer à la suivante. Sinon, les couleurs risquent de se salir et de ternir, perdre en luminosité ;
  • Mélanges progressifs : testez plusieurs dosages du même mélange (ex. 80 % bleu + 20 % jaune, puis 50/50, etc.).
• Étiquetez clairement chaque couleur :
  • soit la référence du godet (ex : A503)
  • soit le mélange réalisé (ex : cyan + ocre jaune, ou rouge carmin + 2 gouttes d’eau)

• Recommandations :
  Notez aussi, à côté des tests de couleurs réalisés ou au-dessous, les effets intéressants que vous observez (granulation, transparence, texture, etc...). NOTA BENE : les mélanges de couleurs peuvent réagir de façon différente selon le type de papier que vous utilisez (coton, cellulose, coton-cellulose, canson, grain fin, moyen, gros, 180g, 300g,…)
• Laissez sécher complètement :
  Avant de ranger votre nuancier ou d’en peindre d’autres couches, assurez-vous que tout est bien sec pour éviter les bavures.
• Rangez votre nuancier à plat pendant le séchage.

Créer un nuancier est une étape essentielle pour progresser en aquarelle. Cela vous permettra de mieux comprendre les interactions entre vos couleurs, de gagner du temps lors de vos futures créations, d’éviter les erreurs malencontreuses pouvant gâcher une œuvre presque terminée, mais aussi de lister rapidement les couleurs que vous devez racheter.

Le nuancier est un outil précieux autant pour les débutants que pour les artistes confirmés.

Je vous invite à créer un nuancier principal, puis des nuanciers secondaires pour des thématiques spécifiques, notamment si vous peignez des carnets de voyage, donc dans un temps limité, car vous saurez alors rapidement quel mélange utiliser pour quel rendu (ex : nuancier "ciel", "mer", "rochers", etc…).

Expérimentez autant que possible, laissez-vous surprendre par les mélanges, et surtout… n’oubliez pas de prendre plaisir à peindre !

Bonne inspiration et belles créations à toutes et à tous !

Eliora